MON PAYS

Je connais un pays qui n’est pas le Midi,

Je connais un pays qui n’est pas au Levant

Un pays qui n’est pas au Couchant.

Et ce pays, si vous saviez !

Et ce pays, si vous saviez comme je l’aime !

La mer de mon pays a des reflets gris, reflets de ma mélancolie,

Des reflets bleus comme mes jours heureux.

La terre de mon pays y est tantôt brune d’argile fécond,

Tantôt verte d’ondoyants bruissements.

Et ce pays, si vous saviez !

Et ce pays, si vous saviez comme je l’aime !

Mon pays, ce n’est pas que « Le Plat Pays », désolée Monsieur Brel,

C’est « une terre de soleil, de vallons et de douce nature », merci Monsieur de Lamartine.

Ses monts ne sont pas des montagnes, bien sûr.

Le Mont des Cats, le Mont Cassel, le Mont Noir, le Mont Rouge, pour ne citer que ceux-là,

S’étendent sur une chaîne verdoyante appelée « la Cordillère des Flandres ».

Et ce pays, si vous saviez !

Et ce pays, si vous saviez comme je l’aime !

Mon pays, parfois loin de toi, je fuis,

Parfois pour d’autres continents, je te quitte.

Mais toujours, je te reviens,

Mais toujours, je te reviens comme une femme vers son bel amant.

Mon pays, si tu savais !

Mon pays, si tu savais comme je t’aime !

Parfois, le sais-tu, parfois je suis un peu jalouse.

Pourquoi ? Tous ceux qui viennent vers toi, tu les « prends dans tes bras »

Et plus jamais ne les lâches.

Mais va, je te pardonne.

Auprès de toi, on se sent si bien.

Parfois on me demande, souvent on me demande

Pourquoi je t’aime ?

Je t’aime pour tes villages, pour tes villes où flottent encore l’esprit flamand, l’esprit ibérique.

Pour tes églises, de la cathédrale la plus majestueuse à la plus petite chapelle nichée dans la verdure.

Je t’aime pour tes beffrois s’élançant fièrement dans ton ciel bleu pâle.

Pour tes « bateliers qui promènent leur maison naine par les canaux »,

Pour tes « moulins qui tournent au fond du soir sur tes ciels de tristesse et de mélancolie »

Je t’aime pour tes longs fleuves, « l’Escaut, route du vent et du soleil »,

« La Lys, qui entoure de ses mille et mille méandres pour mieux la tenir serrée entre ses bras, la Flandre »

Je t’aime même pour ta « pluie, avec ses longs fils gris, avec ses cheveux d’eau, avec ses rides »

Je t’aime pour tes poètes qui t’ont si bien chanté, merci Monsieur Verhaeren.

Je t’aime pour tes estaminets où flottent les odeurs de bières, de carbonnade, de lapin à la moutarde,

De tarte au sucre, à la cassonade, de café à la chicorée.

Je t’aime pour tes champs de blé blond ondulant sous le vent, tes champs de lin, de houblon.

Pour tes sous-bois, tes sentes, tes chemins ombragés.

Je t’aime pour tes pavés, tes corons, tes courées.

Je t’aime pour ton accent.

Je t’aime tout simplement.

Quand mon cœur est à la fête, le tien m’offre sa folle compagnie.

Carnavals joyeux, défilés de géants des Flandres, de Gilles, de jeunes majorettes,

Concerts de carillons, fanfares, fêtes d’accordéon.

Mon pays, si tu savais !

Mon pays, si tu savais comme je t’aime !

J’aime ton souffle de vent soulevant mes longs cheveux,

Tes caresses de soleil sur mon corps, tes baisers de rosée sur mon visage.

J’aime le sable de tes plages coulant lentement entre mes doigts.

J’aime la terre de tes sentiers gardant fidèlement l’empreinte de mes pieds.

Mon pays, tu le sais !

Mon pays, tu le sais combien je t’aime !

Je connais un pays qui pour moi est un trésor !

Et ce pays, je vous le dis,

Et ce pays, c’est le Nord.